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La presse en parle

L’Alliance Française, la grande oubliée, par Jean-Pierre de Launoit, Erik Orsenna et Bernard Pivot

Article du Monde, le 8 mars 2010 >>

https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/03/08/l-alliance-francaise-la-grande-oubliee-par-jean-pierre-de-launoit-erik-orsenna-et-bernard-pivot_1316025_3232.html

Il y a une grande absente dans le débat sur notre diplomatie culturelle ouvert opportunément par Le Monde daté 21-22 février. Elle s’appelle l’Alliance française. Son réseau mondialement connu est pourtant un acteur essentiel du rayonnement culturel et linguistique de notre pays.

On ne sait pas toujours que le réseau culturel français à l’étranger a été le premier à se constituer, avant ses homologues européens, par la création de l’Alliance française, en 1883. L’idée des fondateurs de l’Alliance, parmi lesquels on compte Ferdinand de Lesseps, Jules Verne ou Louis Pasteur, était simple et géniale. Elle consistait à confier aux amoureux de notre langue et de notre culture dans chaque pays, donc à des étrangers, le soin de les faire connaître et apprécier à leurs compatriotes de façon désintéressée.

La formule a connu un extraordinaire succès sur les cinq continents et les implantations, de la Terre de Feu aux confins du Canada, de la pointe du continent africain au nord de l’Europe, à travers l’Inde, la Chine et l’Océanie, se sont multipliées durant le XXe siècle. Si bien qu’aujourd’hui le réseau culturel français est composé de près d’un millier d’Alliances françaises dont 300 sont reconnues comme des centres culturels et linguistiques à part entière par le ministère des affaires étrangères, et de 150 centres culturels ou instituts français relevant directement de l’Etat.

La France dispose donc d’un dispositif unique au monde de 450 établissements actifs, dont les Alliances françaises représentent les deux tiers. Nous faisons beaucoup mieux que nos amis britanniques (233) ou allemands (143).

Qu’est-ce qu’une Alliance française ? C’est une association de droit local, autonome, administrée bénévolement par des personnalités étrangères (plus de 8 000 en 2010). On dit souvent que seules les Alliances de France sont françaises, les autres sont brésiliennes, chinoises ou angolaises. Leurs conseils d’administration passent une convention de partenariat avec la France par laquelle ils situent clairement leurs activités dans le cadre de notre politique culturelle extérieure. La grande originalité de l’Alliance, dans le fond, est que son action culturelle est soutenue par ceux-là mêmes à qui elle s’adresse.

Les Alliances sont condamnées au succès car leur prospérité dépend avant tout de leur dynamisme et des ressources de leur environnement économique et social. Elles ont les vertus de l’initiative civile et de la gestion directe. Dotées d’une grande souplesse opérationnelle, elles parviennent à s’autofinancer à plus de 75 %, grâce aux cours de langue (500 000 étudiants par an) et au mécénat local.

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Elles ont acquis depuis cent vingt-cinq ans une telle notoriété à l’étranger en tant que réseau de culture française que, lorsque le prix Prince des Asturies, sorte de Nobel espagnol, a été attribué en 2005 aux instituts culturels nationaux, c’est à l’Alliance française qu’on l’a remis, aux côtés du British Council et du Goethe Institut.

Notre institution, première organisation non gouvernementale culturelle mondiale, est très optimiste et confiante dans l’avenir. Le ministre des affaires étrangères et européennes a réaffirmé solennellement il y a un mois son soutien aux cinq cents responsables étrangers et français venus du monde entier, s’associant ainsi à l’intérêt éclairé des ambassadeurs en poste et à la sympathie des partenaires et des autorités locales des pays où les Alliances sont implantées. Pour donner une idée, dans toute l’Amérique, du nord au sud, à part deux ou trois villes, tous nos établissements culturels sont des Alliances françaises. Il en va de même en Inde, à Madagascar, à Singapour ou en Australie. Ce réseau en pleine croissance (plus de 3 % par an), et qui bénéficie du soutien humain et financier du ministère des affaires étrangères, connaît depuis dix ans un développement fulgurant en Chine, en Russie ou en Afrique.

La maison mère à Paris a fêté son anniversaire d’un siècle et quart en se transformant en 2008 en fondation. Dotée d’un conseil d’administration où siègent entre autres Hélène Carrère d’Encausse et Abdou Diouf, la Fondation Alliance française a déjà réussi à lever plus de 5 millions d’euros en capital, et concentre ses efforts sur une démarche qualité et une aide aux projets de développement et de professionnalisation.

La modernité de son organisation, qui fait reposer les échanges culturels sur un partenariat véritable, incarné par des interlocuteurs étrangers généreux et passionnés, la souplesse de son financement, fondé sur les ressources propres et un soutien public maîtrisé, lui donnent aujourd’hui la conviction d’incarner l’avenir.