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Écoresponsabilité – l’Alliance Française de Normandie et les émissions carbone : un bilan, des engagements

Début 2022, soutenue par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) et la Fondation des Alliances Françaises, l’Alliance Française de Normandie est devenue la première Alliance Française dans le monde à réaliser son bilan carbone (cf. Fil d’Alliances n°57, hiver 2022).

Après 6 mois de travaux et de calculs réalisés sur l’ensemble de nos données par l’équipe de l’Alliance et le Bureau des Acclimatation (notre partenaire technique, spécialiste de l’accompagnement de la transition environnementale dans l’industrie culturelle) les résultats ont été présentés en octobre dernier pendant une réunion plénière dédiée et accueillant pour l’occasion le conseil d’administration et le délégué de la Fondation pour les Alliances Françaises de France.

Avec un modèle économique dépendant essentiellement des mobilités internationales et donc du transport aérien, nous savions nous exposer à des résultats pénibles en réalisant ce bilan. 85% des inscrits effectuent en effet en moyenne plus de 1 000 km en avion pour assister à nos cours, et ce sont 11 millions de kilomètres en avion qui ont été parcourus par nos apprenants en 2019.

2 000 tonnes de CO2 sont donc relâchées chaque année par les activités de l’Alliance Française de Normandie.

C’est à dire l’équivalent d’une grande scène nationale, 53 000 ans de chauffage individuel ou encore la fabrication de 75 000 smartphones. Pour une Alliance de taille moyenne, ce chiffre semble presque démesuré.

Pourtant, et si nous les rapportons à nos propres indicateurs, ce sont bien 25,5 kg d’émissions nocives qui sont relâchées pour chaque heure de cours vendues. S’il faut encore filer la comparaison, un smartphone, de sa fabrication à la fin de sa durée d’utilisation, a une empreinte carbone d’environ 80 kg de CO2.

1,5 tonnes de CO2 par inscrit… Lorsqu’on est sensible au sujet et bien sûr tout autant intimement convaincu de l’utilité de nos missions statutaires, qualifier de pénible ce bilan est un euphémisme.

Loin pourtant de vouloir verser dans une sorte de pathos écologique, ou de mettre brutalement la clé sous la porte par respect pour l’environnement (« étudier le français en France oui, mais à quel prix pour la planète? »), si nous savions déjà la nécessité de travailler sur notre modèle économique et nos modalités d’accueils pour plus de sobriété carbone, notre impact est aujourd’hui chiffré et nous pouvons aller de l’avant, conscients des enjeux comme du défi pour l’Alliance et ses équipes.

Grâce à ce bilan, nous avons en effet pu identifier également plusieurs leviers d’action que nous avons déclinés en solutions individuelles (ajuster la proposition de formation en fonction de la distance parcourue), en solutions directement intégrées au catalogue de formation (mise en place de nouvelles offres d’abord ajustées en fonction de la dépense carbone puis proposées explicitement comme présentant un moindre coût CO2 pour l’Alliance), et enfin en solutions pour le management avec la mise en place d’un tableau de suivi des émissions qui, aux côtés des indicateurs de résultats, permet d’intégrer l’argument de la dépense carbone au coeur des négociations et d’inciter à faire des choix de sobriété avec l’Alliance.

Ces leviers doivent nous permettent d’atteindre des objectifs de réduction chiffrés, avec 6% à 7% de réduction des émissions attendue dès la première année (Accord de Paris cf), pour un passage sous les 1 800 tonnes par an et environ 24 kg de CO2 par heure de cours dès 2023. Nous proposons ainsi déjà au catalogue dès le 1er janvier une formule de cours à moins de 20 kg d’émissions pour l’Alliance.

Bien que moins pertinents puisque difficilement quantifiables, nous avons également défini des objectifs de compensation (mise en place jardin pédagogique remplaçant un parking auto, renaturation du bâtiment, etc.). Enfin des objectifs de contribution sont également inscrits au projet d’établissement avec l’intégration au programme culturel d’un catalogue d’activités de sensibilisation et une convention de partenariat signée avec la ville de Rouen.

Près de 10% de ces émissions restent dues à d’autres postes : par exemple la consommation d’énergie (18 tonnes de CO2 en 2019), ou les déplacements des équipes. Là aussi, un plan d’action se met en place pour les diminuer en travaillant sur les mobilités durables ou les économies d’énergies. Ces dépenses carbone étant plus directement entre nos mains, un réduction plus ambitieuse de 10% sur ces postes d’émissions est programmée pour 2023.

La convention triennale de partenariat avec la ville de Rouen, qui vient d’être votée à l’unanimité par le conseil municipal, intègre maintenant plusieurs accords de partenariat avec la Direction des espaces publics et naturels et la Direction des transitions, avec des engagements de l’Alliance à participer au déploiement du dispositif Fil vert (renaturation de l’espace urbain), la participation aux clean walk organisées par la ville ou encore aux ateliers biodiversité Rouen Naturellement. Et, en priorité bien sûr, une réduction chiffrée des émissions liées aux activités de l’Alliance sur le territoire.

On a pu nous dire que de réaliser ce bilan était « suicidaire » ou encore que nous nous tirions « une balle (verte) dans le pied », considérant la nature de nos activités et notre modèle économique dépendant de la mobilité ou des séjours linguistiques.

Nous pensons à l’inverse que d’assumer ce bilan est structurant. Et que de communiquer clairement sur nos objectifs de réduction ne peut qu’être un atout pour l’Alliance. Après tout ses publics et ses partenaires sont, comme tout un chacun, à mesure plus sensibles à l’urgence climatique.

On entend souvent aujourd’hui les spécialistes débattre : « Arriverons-nous à temps pour la planète ? » ou encore « N’est-il pas déjà trop tard ? ».

Quoi qu’il en soit, nous nous sommes mis en chemin.

Laurent Elisio Bordier, directeur, Aliance Française de Normandie